3.1 Isoler certains actifs en vue d’une cession : le cas du patrimoine immobilier

Les experts de la préparation à la cession d’entreprise s’accordent très souvent sur un même schéma : rendre l’entreprise la plus attractive possible pour les futurs repreneurs et pour les organismes qui participeront au financement de la reprise. Or, l’immeuble dans l’entreprise gonfle souvent le bilan, et n’intéresse pas forcément le repreneur. Sortir l’immobilier facilite la cession en diminuant le coût d’acquisition pour le repreneur. Alors que le financement de la reprise d’une entreprise à crédit est assez court, généralement sur 5/7 ans, le financement d’un  bien immobilier est plutôt d’une durée de 15 ans, ce qui va peser sur les comptes de la société d’exploitation nouvellement acquise. On voit ainsi de plus en plus de schémas dans lesquels le chef d’entreprise est propriétaire de ses immeubles au travers d’une SCI, qui va les donner en location à la société d’exploitation.
Sortir l’immobilier de la société avant sa cession présente plusieurs avantages :
Avant la cession de la société


  • La SCI va donner en location le patrimoine immobilier à la société d’exploitation, qui pourra déduire des loyers à charge.
  • Le qualification de biens professionnels et donc l’exonération d’ISF est reconnue tant que la SCI loue à la société d’exploitation.
  • Le chef d’entreprise peut mettre à l’abri des actifs facilement valorisables, en cas de difficultés futures de sa société.

 
Au moment de la transmission du patrimoine

  • Établir une distinction entre patrimoine privé et professionnel et rétablir un certain équilibre entre les deux.
  • En cas de reprise de l’activité par un des héritiers, le chef d’entreprise peut rétablir l’égalité financière entre les deux enfants, tout en concentrant le pouvoir entre les mains de l’enfant repreneur. Il évite au maximum d’attribuer des parts sociales à l’enfant non repreneur, qui aurait le statut d’actionnaire minoritaire, situation qui pourrait être source de conflit. L’héritier non repreneur reçoit le patrimoine immobilier isolé. Il aura alors comme choix soit de le revendre, soit de continuer à le louer à la société d’exploitation.
  • Isoler le patrimoine immobilier à travers une SCI permettrait une transmission facilitée des parts de la SCI, tout en bénéficiant de l’abattement de 151 950 € par période de six ans dans des conditions plus souples que si le dirigeant procédait à des donations de parts indivises d’un immeuble. Et si le rachat de l’immeuble par la SCI s’est fait à crédit, la valeur des parts transmises serait diminuée du capital encore du, ce qui aura pour effet d’alléger les DMTG.

 

Après la cession d’entreprise

  • Constituer des revenus futurs à l’ex-chef d’entreprise. Même en cas de transmission de la nue-propriété de la SCI à ses enfants, il peut continuer à en percevoir les loyers.

 

Quelques inconvénients sont à prendre en considération :

  • Isoler le patrimoine immobilier dans une SCI, avant une transmission d’entreprise ne permet pas d’appliquer l’exonération partiel Dutreil sur cet actif. Les sociétés éligibles doivent avoir une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et donc des détenteurs de parts d'une société à prépondérance immobilière ne semblent pas pouvoir signer d’Engagement de Conservation collectif.
  • De plus, si les droits d’enregistrement sur les sociétés de capitaux ont été harmonisés, les cessions de participations dans les sociétés à prépondérance immobilière non cotées demeurent soumises à un droit de 5% sans plafonnement ni abattement, ce qui alourdit toute fiscalité en cas de cession et non de transmission à titre gratuit des parts de la SCI.
  • Souvent le patrimoine immobilier peut servir de cautionnement pour l’entreprise pour l’obtention de crédit. Les banques préfèrent comme garantie un bien immobilier plutôt que des parts de SCI, moins liquides.
  • Le coût fiscal de sortie du patrimoine immobilier reste élevé. La vente de l’immobilier à une SCI va déclencher une plus-value proche du prix de cession (on suppose que l’immeuble aura été complètement amorti), qui va être compris comme un résultat exceptionnel soumis à l’IS. Dans le cas de notre société Ciblex, le capital social est inférieur à 7 630 000 €, et détenu à 100% par des personnes physiques, le bénéfice sera imposé au taux de 15% sur les 38 120 premiers € puis 33.33%. La cession de l’immobilier sera entièrement taxée à la tranche supérieure, c’est-à-dire 33.33%. Il ne s’agit pas d’une entreprise individuelle, donc les plus-values immobilières à long terme ne bénéficient d’aucun abattement. Si on suppose que l’immobilier est valorisé à 1.5 millions d’€, le coût fiscal au niveau de la société d’exploitation est de 500 000 €.
  • Si la société d’exploitation est déjà en bonne santé financière, la trésorerie supplémentaire générée par la vente de l’immeuble risque d’être dépréciée au moment de la cession de l’entreprise : la sortir sous forme de dividendes a un coût non négligeable. Pour sortir le produit de cession de l’immobilier, (1 million d’€ net de l’IS) sous forme de dividendes, le frottement fiscal de 30.1% sera de 300 000 €. Au total, la valeur de l’immobilier a été amputée de 53% de sa valeur initiale.

 

Plusieurs options peuvent êtres envisagées pour optimiser la sortie de l’immobilier, aucune n’étant la solution idéale : l’apport à une SCI, la distribution de l’immobilier sous forme de dividendes, la scission de la société d’exploitation en deux entités nouvelles…

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